Nove raconte – Épisode 2 : L’an 2000, ou comment rater sa vie en beauté
- ladouchefroideartists
- 6 avr.
- 5 min de lecture

L’an 2000…
Où sont les voitures volantes ? Les robots qui se tapent les tâches ménagères et les remèdes aux maladies ? Où est l’égalité entre les riches et les démunis, la paix étendue sur la surface du globe ? La disparition de la famine et des inégalités entre les peuples… Une mauvaise blague…
L’an 2000 commence pour moi par le remboursement d’une dette, une de plus, et à courir derrière un billet de banque. C’est mon sport national depuis que j’ai passé la dizaine. Comme je te l’ai dis avant : j’suis un gosse de divorcés et comme je l’ai décris dans « Regarder devant » après la séparation de mes parents j’ai connu la disparition des privilèges d’un môme né dans une famille « normale ».
Par normale j’entend deux parents qui travaillent, donc deux salaires, une maison dans un village adorable, entouré de potes avec qui je passe toutes mes journées dehors en attendant les grandes vacances pour aller voir la mer. Avant l’an 2000 un couple d’ouvriers pouvait partir 15 jours au bord de la grande Bleue avec 4 gosses sans faire un crédit Sofinco… J’ai surkiffé mon enfance. Tout n’était pas rose évidement mais tellement plus simple et saint.
Y’avait pas autant de médias pour distiller la peur. La crainte de l’autre à toutes les sauces. Le danger permanent que représente le dehors. On passait notre existence à l’extérieur sans se demander si on allait être kidnappé par un pédophile ou si on allait se faire agresser par un malade mental.
La violence a toujours existé mais elle n’était pas relayée en boucle sur BFmerde et LFi’stérique. Ça devient rare de croiser des gosses tout seul en forêt par exemple alors que nous on y passait notre vie.
Bien sûr que ça ne nous a pas empêché de faire des conneries, on était des gosses, mais pas un de nous n’aurait eu l’idée de se balader avec un couteau… Je te vois venir. On a tous connu un barjot qui le faisait mais comme d’habitude je vais te répondre que je me fous des exceptions, seule la masse m’intéresse.
On a connu les bagarres au bal de village et les rixes entre bandes à la fin d’un match de foot mais ça se soldait par quelques coups de poings dans la gueule et basta. Tu ne m’enlèveras pas de la tête que les médias sont en grande partie responsables de la merde sociétale dans laquelle nous vivons. La haine attire la haine et l’exposition de celle-ci attise les flammes. Je deviens vieux et comme tous les vieux je déteste cette époque.

Bien sûr que c’était mieux avant, je le sais, car quand j’étais jeune tous les anciens rêvaient de revenir en arrière. Moi pour rien au monde j’aimerais avoir 15 ans en 2025. J’préfèrerai me faire écarteler en place publique mon copain…
Novitch… Tu t’es ENCORE égaré.
Revenons-en à l’an 2000 et que se passait-il niveau artistique pour moi en cette période.
Comme j’ai commencé à t’en parler dans l’épisode 1, j’ai commencé à écrire mes premiers rap au début des années 90.
En 94 c’est les Wrofneckas avec X2B. On se retrouvait chez lui pour des soirées Hip Hop passionnées. Politiquement engagés à l’ultra gauche nos thèmes d’écriture étaient très axés sur les inégalités, l’injustice sociale, la dépénalisation du cannabis, le racisme et tout le starter pack d’un membre de la LFI actuelle. Rien de neuf sous le soleil.
Je n’ai pas connu le privilège blanc la première fois que j’ai poussé la porte des ASSEDIC. Ni quand j’ai demandé une formation quand j’étais chez Peugeot et qu’on m’a envoyé ch… comme une merde. Aucun privilège non plus quand j’ai touché le fond et qu’on m’a fermé mon magasin d’instruments de musique en ne me laissant rien que des dettes et des ulcères saignants. Aucune aide, aucune pitié. Je me suis relevé seul, comme d’habitude.
Mon père disait, paix à son âme :
« Qui part de rien pour arriver à pas grand-chose n’a de merci à dire à personne »
C’est mon cas : merci à personne sauf à moi-même !
Wrofneckas ne fut soutenu par aucune structure et sans moyens financiers nous n’avons jamais réussi à produire un album en studio. Juste une mixtape en cassette. That’s Life ! Merci à personne, encore.
Je continue à écrire et à poser mon blaze sur les murs, du fort Hatry aux ruelles sombres, Conjure La Poisse ma gueule !!! Nos routes se séparent avec X2B et je passe le reste de mon temps libre à jouer au basket. C’est sur un terrain que je rencontre Daf Law avec qui je mets mon projet Travailleurs De l’Ombre sur les rails.

Utopiste que je suis… Je pensais fédérer un nouveau mouvement qui ne parla à personne sauf à nous. Une très belle aventure cela dit. On pose « Premier assaut » dans un chalet à Lamadeleine Val des Anges avec Juan Karl aux commandes musicales. Rapidement rejoints par de vrais musiciens pour aller défendre cet opus sur scène.
Première date au fort Rock de Giromagny, premiers frissons de retour sur scène. C’est de la drogue dure cette merde ! J’ai la chance de jouer avec Thierry Tran et Gérôme Geney, et ça pour un rappeur Belfortain c’est une chance mon Copain.
Jusqu’à nous emmener aux portes des Eurockéennes. Le Grâal pour tout musicien local.
Tremplin 2003, première manche gagnée à la Poudrière, finale au Moulin de Brainans.
Ça se joue à l’applaudimètre, un bus de supporters nous suivent pour célébrer ce qui devrait être un super début de carrière pro. Concert de fou = applaudimètre explosé haut la main, mission accomplie, rendez-vous le 1er juillet pour fêter mes 30 ans sur scène aux Eurock la famille !
Badabooooooom !!!!
Le gagnant est… TAF.
22 ans se sont écoulés et j’ai toujours le même hérisson coincé dans la gorge. Ni oubli, ni pardon. J’ai été volé et par la même occasion on a flingué ma carrière. Le train ne passe jamais deux fois.
Bien sûr j’ai continué à écrire, à faire des scènes locales, même des jolies : festival de la Paille, Rencontres et Racines, La Guerre du Son, deux-trois Fimu sur les grandes scènes avec EKS-TDO… Mais plus jamais un journal parisien (Libération pour ne pas le citer) ne m’a recontacté comme en 2003 et la finale des Eurock.
Tu comprends pourquoi je leur ch… dessus à chaque occasion qui se présente ?
Depuis j’y ai plus jamais foutu les pieds… Quel épisode de merde…
Ça va, je t’ai pas parlé des pneumothorax et des hospitalisations à répétition, les drains dans le poumon, la douleur ineffaçable et les décès qui jalonnent mon parcours de vie. Je garde ça pour un épisode « spécial merde » pour les gens qui aiment se nourrir du malheur des autres, pour les spectateurs de BFMerde et LCI’stérique.
J’avoue qu’avoir écrit cet épisode m’a quelque peu remué les tripes. C’est con ! C’était un dimanche ensoleillé comme on n’en a pas connu depuis un bail. C’est con, j’aurais pu rejoindre PUM’s à Danjoutin pour aller peindre. J’ai préféré me poser face à mon clavier et vous raconter tout ça.
Masochiste, utopiste, dernier de la liste… J’espère un jour pouvoir connaître un mot qui finit en ISTE qui pourrait être positif.
Macroniste ?? AHAHAHA je voulais terminer cet épisode par une bonne blague de merde mon copain.
Heureusement pour mes lecteurs, le prochain épisode sera bien plus joyeux !
Je vous raconterai comment je suis sorti des ténèbres de l’alcoolisme et des dépendances néfastes. La création de La Douche Froide, mon mariage avec Elise.
Comme j’ai écrit un jour :
Le soleil revient toujours.
We’ll never Die ! Et… QUE DU BON !!!
Nove.
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